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Tag - JDR francophone

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Les âges du jeu de rôle francophone - version 2021

J'ai enfin achevé mon texte sur les âges du JDR francophone (commencé en 2017-2018...) dont j'ai parlé à plusieurs reprises sur le forum Casus No, avec présentation/élaboration de versions intermédiaires.

Au final, le document fait 24 pages et vous le trouverez en lien : http://qui.revient.de.loin.blog.free.fr/public/JDR_Documentation/Les_ages_du_JDR_v4_20211024.pdf

Scènes nationales du jeu de rôle

Voici un rapide graphique pour essayer de visualiser les dates de début des scènes nationales du jeu de rôle. Ces dates sont soit celle de la traduction en langue nationale d'un jeu étranger (le plus souvent D&D), soit celle de la création du premier jeu nationale ou de la première revue locale sur le jeu de rôle, suivant laquelle s'est produite en premier.

(Cliquer pour agrandir)

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En gardant en tête le biais linguistique du GRoG (tenu par des francophones, parlant généralement en deuxième langue l’anglais), on observe que les scènes nationales de JDR les plus importantes sont, par ordre :

  1. USA et Royaume-Uni (68 %), ce qui est logique vu l'antériorité du JDR chez eux et la taille de la communauté anglophone (1,5 milliard de locuteurs)
  2. France (et Belgique wallonne, Suisse romande, Québec canadien ; 28 %), pour une communauté de 290 millions de locuteurs
  3. Espagne (1,6 %), pour une communauté de 577 millions de locuteurs
  4. Japon (0,6 %)
  5. Allemagne-Autriche, Italie (0,5 %)

JDR et différences nationales [Notes]

Ci-dessous se trouve des notes pour réfléchir. Il ne s'agit pas d'un billet structuré.

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JDR et différences nationales

Avant propos : beaucoup de choses dans la création de jeux et la pratique du JDR (jeux, façon de jouer, intérêt) sont communes aux joueurs français et aux joueurs du reste du monde (essentiellement américains on va dire au vu de leur nombre et de la connaissance de ce milieu par les Français). Le creuset du JDR est bien D&D (américains, héroic fantasy, issu du wargame).

De même, une grande part des divergences s’expliquent à la fois par les divergences culturelles entre les peuples et par les différences de taille des marchés (les niches de l’un sont la pratique majoritaire de l’autre en matière d’effectifs*).

Enfin, dans chaque communauté il y a bien évidemment un large spectre de pratiques et de créations.

Toutefois, ce qui nous intéressent ici sont les différences que l’on peut trouver dans des communautés qui certes ne sont pas forcément représentatives mais qui sont tout de même notables.


*Comment comparer les USA (13 millions d’habitants) et la Suède (9 millions) ?

US/Europe

US/Suède (Europe)

La prévalence de D&D et ses variations, à la fois comme porte d’entrée au JDR et comme pratique majoritaire, pourrait expliquer la différence de pratique perçu entre les USA et l’Europe:

  1. une orientation moins centrée sur les combats et les règles en Europe (peut-être dûe à une approche mercantile liée aux figurines et suppléments “de joueurs” qui découlerait d’une plus forte “mainstreamisation” du JDR ? peut-être dûe à une prévalence d ela culture nerd -technique, outcast- aux USA ? ou à une culture plus forte du self-made man et de l’esprit pionnier ?)

  2. une orientation plus centrée sur le roleplay (jeu d’acteur, description à la première personne, distinction entre joueur/personnage, etc.) (peut-être dûe à une prévalence de la culture geek -plus “artistique” et insérée socialement- en Europe ? ou à une culture plus forte du romanesque ?)


Source:

US/France

A priori, les français n’ont pas le sentiment d’avoir une façon de jouer ou de faire des jeux différente de celle des américains.

Toutefois, les exemples de jeux données sont historiques et littéraires : Tenga (historique), Crimes (historique, rédigé sous la forme de nouvelles).

Il est par ailleurs précisé que la traduction de certains jeux américains, en particulier l’appel de Cthulhu (jeu qui eu plu de succès en France qu’aux USA dans les années 1980), est accompagné d’une adaptation (dépoussiérage des règles, changement des illustrations de couverture et interne, changement de la forme des scénarios, identité visuelle, etc.)

La cinquième édition, avec une illustration de Caza pour la version française :

Arkham, avec une identité photographique pour la version française

http://www.legrog.org/jeux/appel-de-cthulhu/1920-s-1930-s/arkham-3eme-ed-fr

Source:

Jeux de société américains/allemands

Si on replace les JDR dans les jeux de sociétés et que l’on s’intéresse à la différence entre deux écoles particulières, on observe :


Jeux américains : aux règles complexes,qui portent plutôt l'accent sur la chance et le conflit, qui mettent plus en avant un thème, aux parties longues qui visent un public essentiellement jeune et masculin.


Jeux allemands : les jeux aux règles simples/épurés, de durée limitée qui portent l'accent sur la stratégie (économie), par opposition à la tendance américaine de jeux auxrègles et à la durée plus longues qui portent plutôt l'accent sur la chance et le conflit (guerre), même s'ils n'ont pas forcément été conçus hors d'Allemagne et par des auteurs d'autres pays.


On voit donc apparaître dans les jeux de société une tendance aux règles complexes et au conflit dans les jeux américains, avec un rôle plus fort de la chance, et une tendance à des règles plus simples mais plus portées sur la gestion et moins dépendant de la chance.

cela conforte en partie la différence en matière de focus sur les règles et le combat du JDR américain par opposition au JDR européen, donc français. Par contre, y-a-t-il un traitement différent de l’aléa ? Peut-être via un possible succès moindre du D20 system (ou du D20, voire du D100 tout simplement), du principe de succès/échec critique ?

Source:


France/reste de l’Europe

GN nordique/GN français-continental

Selon V. Choupeau, certaines communautés spécifiques ont émergé dans le GN français :

  • the experimental scene, for example, which transcends the organizations,

  • the community around the game « Vampire »,

  • the community around scenarized airsoft games,

  • the frenchstyle romanesque larp.


Ce style romanesque existe formellement depuis 2010.


Selon Algayres:

  1. Focus on the character. Character creation is mostly in the hands of the organisers, and they will be very detailed, with a lot of intertwining backstory and built-in information.

  2. A huge impact of the past which explains the details in the character. The backstory gets a significant importance in building the potential for narration and the character’s psyche. Some elements might be kept secret, to be discovered for dramatic impact.

  3. An environment built as a microcosm. The diversity of characters serves as a means to establish the workings of society in the specific time and context of the game, which is why the romanesque usually love historically inspired settings.

  4. The use of narrative archetypes. Romanesque larps often draw inspiration from literary classics and embrace the romanesque genre’s common tropes as a means to drive narration.

  5. The dominance of tragedy, with character-based narrative integrating a lot of human drama, conflicts and character dilemma. This is not an absolute, though, some games advocate a lighter atmosphere or tragedy-comedy mix, such as Rêves d’Absinthe (Algayres and D’authie, 2011), or Prima La Musica (Primoot, 2016).

  6. Tightly-knit narrative arcs, which are meant to reach their climax during the game, with characters living out an exceptional destiny or a defining moment of their lives over the course of the game.

  7. A focus on the characters’ emotions and on each participant’s identification with their character, in the same manner as a reader identifies with a character in a work of fiction. Bleed may occur as a result of identification with the character.


On retrouve donc dans le JDR GN français une importance des thèmes historiques (décor historique, microcosme historique) et littéraires (tradition romanesque, tragédie, importance du passé des personnages, arcs narratifs très travaillés, archétypes, des personnages avec un “potentiel historique” riche).

Source :

GN Belge/GN français

Selon D. Bonvoisin, le GN français serait moins porté sur le jeu en campagne (par opposition aux one shots) que le GN français, ce qui aurait pour effet d’avoir un phénomène de “guilde de joueurs” plus faible en France, et d’avoir un jeu d’acteur plus théâtral car moins basé sur un vécu entre personnage.

Le GN français serait aussi moins porté sur les combats que le GN belge.

Source

France/Japon et reste du monde ?





Un beau livre pour les classiques du JDR francophone [Projet]

Te Deum pour un massacre, un jeu de rôle historique français réédité sous la forme d’un beau coffret.

Le patrimoine et la promotion du jeu de rôle sont importants. Pour moi, pour le loisir. Plus particulièrement pour le jeu de rôle (sur table) francophone.


Pourquoi francophone et pas simplement français ? Parce que la francophonie existe que les frontières sont devenues poreuses et que les échanges d’auteurs, d’éditeur et de jeux entre la France, la Belgique wallonne, la Suisse romande, le Québec canadien, et peut-être même le Liban, l’Afrique du Nord et de l’Ouest, sont fréquents et féconds.


Après tout, cela fait 40 ans que le jeu de rôle s’est implanté en France (1977 pour les plus anciennes traces répertoriées). Mais quarante ans de quoi ? Qu’est devenu le JDR dans le monde francophone ? S’est-il émancipé du géniteur américain ? A-t-il produit des œuvres remarquables ? A-t-il eu du succès ? A-t-il été reconnu, par ses pairs comme par le grand public ? Quelles traces laissera-t-il ?

Things from the flood, un livre d’art de Simon Stalenhag, illustrateur du jeu suédois Tales from the Loop.


C’est pour ces raisons que je pense à un “beau livre”.

Les Norvégiens ont produit Norwegian style en 2009, une belle anthologie de jeu de rôle “à la norvégienne” qu’ils ont traduit en anglais. Les pratiquants du jeu de rôle grandeur nature de la tradition nordique l’ont fait en 2010 avec le Nordic Larp Book (traduit aussi en anglais et récompensé par le Diana Jones award. Les adeptes anglo-saxons du jeu de rôle vidéo sont en train de le faire avec le CRPG Book Project.

Le Nordic Larp Book, avec une double page illustrant l’un des GN nordique fondateur de cette tradition (Trenne Byar).

Norwegian style, an anthology of norwegian roleplaying games.

Double page du CRPG Book consacrée au jeu Ultima VII


Pourquoi pas les francophones ? Avec une version en anglais, qui plus est, pour rayonner dans le monde ?


Pour cela, il faudrait commencer par identifier les jeux de rôles francophones significatifs de ces 40 ans. Ces jeux seraient des “classiques”, mais aussi des des jalons qui n’ont peut-être pas laissé une trace en tant que jeu mais qui ont influencé le “style francophone”, qui ont été des passages obligés dans son évolution ou qui ont représenté à un moment un épitome.

En outre, cette identification des classiques du JDR francophone serait pratique pour conserver et promouvoir ce JDR, en constituant une inspiration pour les bibliothèques et ludothèques qui voudraient se constituer un fond, un indicateur des jeux à mettre en avant sur l’encyclopédie du jeu de rôle (le Guide du rôliste galactique “GRoG”) ou sur Wikipédia, ou d’autres valorisations (réédition au format imprimé ou numérique, best of, anthologie…), etc.


Le livre pourrait donc contenir quelques pages pour chacun de ces jeux, les présentant, analysant les raisons qui les rendent importants, apportant des témoignages des auteurs, des joueurs (PJ et MJ), montrant comment se les procurer, etc.

Il pourrait aussi contenir des essais sur l’existence d’une “école francophone du JDR”, sur les débuts et l’histoire du jeu de rôle en France et dans les pays francophones, sur les jeux et les classiques de demain, sur la scène indépendante ou encore sur les spécificités francophones des cousins du JDR sur table : storygame (si on les exclut du JDR...), GN, cosplay, forum RP

Personnages-acteurs et théâtre au cœur de la trame narrative (L’Agonie du Poète) par J. Epis, in Le GN romanesque sur Électro-GN.


Pour illustrer un tel ouvrage, on ne pourra pas employer des photos comme pour le Nordic Larp Book, le JDR étant bien moins photogénique que le GN. En revanche, les couvertures des jeux français ont souvent été plus belles que leurs homologues américains, et le public rôliste a été très friands des écrans, plus que les rôlistes anglo-saxons. Ces illustrations pourraient donc fortement contribuer à faire de l’ouvrage un “beau livre”.


Ambre, et les oniriques illustrations de Florence Magnin pour la version française (à droite).

La cinquième édition de l’Appel de Cthulhu, avec une illustration de Caza pour la version française (à droite).

Écran de Te deum pour un massacre illustré par R. Barthélémy.



La réflexion est déjà lancé sur le forum Casus No, que ce soit par moi ou d'autres membres de la communauté :